mercredi 5 juin 2013

Non, le printemps n’est pas mort !



Je vous parle d´un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, le printemps en ce temps là, accrochait ses lilas jusque sous nos fenêtres, Stravinsky pouvait sacraliser cette saison en composant  son célèbre ballet qui fit scandale à sa création, et Vivaldi nous tromper éhontément en nous vendant la fable musicale de ses quatre concertos saisonniers pour violons.

L’on ne peut donc que se réjouir de la disparition de ces vendeuses ambulantes qui sillonnaient les rues de nos grandes villes en abusant de notre crédulité en se faisant appeler abusivement ‘’marchandes des quatre saisons’’. 

Car nous le savons bien, nous habitants de l’hexagone en  2013, le printemps n’existe pas ou plus exactement est entré dans un cycle de dépressions dont il n’arrive pas à s’extirper et est plongé dans une léthargie probablement provoquée par une carence en vitamine D. 
En un mot, ce printemps est pourri.

Et pourtant, au début, le printemps avait bonne réputation, après celui mémorable de Prague vint  l’arabe, le printemps, étymologiquement c’est le premier temps, le début de l’été en quelque sorte, une nouvelle ère, une renaissance.

Celui  qui avait éclos en Tunisie en décembre 2010 et s’était étendu à Égypte produisait des  bourgeons prometteurs de liberté et d’espoir qui se sont hélas étiolés rapidement.

L’autre Printemps, gaulois, celui là,  emblème d’une chaine de magasins dédié à la mode et au chic français vient même d’inventer le concept de soldes suprêmes. Pour oser accoler solde à suprême la situation doit être grave pour lui aussi.

Nous connaissions déjà le mariage de cour, d’instant, d’honneur, de volonté  avec l’adjectif concerné et même de délices gastronomiques comme le suprême de volailles et autres fantaisies culinaires mais la braderie suprême nous semble avoir un petit air de liquidation judiciaire.

Et voilà que notre primesautier ministre de l’intérieur se met en tête d’interdire, que dis-je, de dissoudre le printemps français. S’il est communément admis qu’une hirondelle ne fait pas le printemps, le premier flic de France a le pouvoir de  le défaire.

Mais enfin, pourquoi s’acharner autant  sur une saison si mal en point, n’est ce pas comme tirer sur une ambulance? ses bataillons de CRS n’ont –ils pas d’autres cibles à bastonner et à gazer que ce printemps dépressif et cacochyme ? 

Comment un ministre socialiste peut-il s’attaquer sans vergogne à un avantage acquis même réduit à ses maigres acquêts. Je rappelle que nos ancêtres ne considéraient vraiment que deux saisons, l’été et l’hiver. Le printemps n’étant en l’occurrence que le lever de rideau de l’été.  Quid également du printemps de Bourges ? 

Toutes ces questions existentielles me taraudaient l’esprit et je n’avais même pas évoqué le sort de ces fameux rouleaux japonais lorsque je m’apprêtais à conclure cette  chronique printanière en forme de notice nécrologique.

Heureusement, un ami de passage eut la bonne idée de vouloir relire ce billet, il me fit remarquer  qu’il y avait méprise de ma part, que ma lecture était restée trop superficielle et que je ne devais plus me contenter de lire les titres des gazettes si je voulais continuer à prétendre commenter l’actualité

Il m’expliqua alors doctement que ce n’est  pas le temps pluvieux et nuageux d’un printemps automnal que notre ombrageux catalan veut éradiquer mais un groupuscule tout aussi nébuleux et à l’appellation incontrôlée qui a fait si peur aux enfants et à nos gouvernants dans les récentes manifestations tout en épargnant miraculeusement les vitrines et les voitures. 

Nous voila rassurés, ce printemps dépressionnaire pourra continuer à déverser ses tombereaux de pluie et son festival de  giboulées pendant que nous nous abandonnerons langoureusement à notre habituelle dépression saisonnière.

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