mercredi 5 juin 2013

La jeunesse est acédique !



Ça m’était arrivé fin aout 2012, le spleen de la fin prochaine de l’été associé à une photo de Jack Lang, icône de l’éternelle jeunesse vue dans un quelconque magazine, car à cette période de l’année les journalistes recyclent leurs marronniers et l’homo festivus de service.

J’avais  décidé soudainement de ne plus être jeune et avais même cru bon pour éviter ensuite de me renier de le crier dans une chronique à la face de quelques rares lecteurs, probablement coincés dans un mobil-home en attendant que la pluie veuille bien cesser afin de finir leur partie de boules.

Bien entendu cette décision courageuse et irréversible était, je vous le concède, assez facile à prendre, d’autant qu’il y avait quelques décennies qu’aucune personne de censée, ne m’avait pris pour un jeune.

J’avais bien développé quelques arguments pour étayer cette résolution mais je sentais parfois  ma détermination vaciller et craignais de retomber à nouveau dans une’’ jeunite’’ aigue dont seule la mort pourrait me délivrer.

Longtemps j’avais rêvé de mourir jeune et en bonne santé  comme certains héros de mon adolescence mais l’âge avançant, je décidais de prendre mon temps, de musarder en chemin, de freiner l’allure.
 Alors mourir jeune et même en ayant l’air de,  devenait une gageure, un défi qu’il m’était de plus en plus difficile à relever.
C’est alors que je lus dans le Monde un entretien avec un écrivain philosophe Georges Steiner qui s’exprimant sur la jeunesse Française parlait de jeunesse acédique. Benoitement je crus qu’il s’agissait de la création d’un néologisme se rapportant aux allocations chômage  et donc  d’une invention langagière assez désespérante pour nos jeunes pousses.

Je décidais donc d’aller plus loin et de lire ce que disait cet érudit sur cette acédie qui frapperait notre jeunesse et ce que recouvrait ce mot , sa signification, mais aussi parce que j’ai toujours éprouvé une grande appétence pour les vocables rares.

L’acédie, un mot d’origine religieuse, désigne ce qui est plus qu’un vague à l’âme passager, une torpeur spirituelle, une inclinaison à la paresse, à l’apathie. Steiner n’est pas tendre avec la jeunesse actuelle dont il estime « qu'elle est un peu plus abrutie que celle des générations précédentes et qu’elle est inculte, franchement inculte, dotée de connaissances plus que vagues dans tous les domaines, l'histoire en particulier » 

Évidemment, il exagère un peu en  noircissant le tableau qu’il peint de cette jeunesse. On pourrait lui rétorquer qu’elle arrive à se sortir de cette apathie quand il s’agit de célébrer avec une ferveur exubérante le titre du PSG et même d’émerger de sa torpeur spirituelle quand elle s’enthousiasme pour ‘’Allo non, mais allo quoi" de Nabila qui est à cette génération ce que fut pour les précédentes la ‘’tirade du nez’’ de Cyrano en plus concis.

Il finit même par lui trouver des circonstances atténuantes implicites quand il décrit notre société contemporaine avec cette inflation de normes, cette frénésie légiférante qui étouffe toute velléité créatrice et finit par asphyxier l’initiative individuelle comme un boa constrictor le fait de sa proie. 

Le reste de sa démonstration était plus politique et par conséquent plus polémique mais ce que j’avais lu me suffisait, il n’était pas envisageable d’ajouter à tous les maux dont je souffrais un autre mal  même si le mot qui le qualifiait me séduisait. 

Au moins la vieillesse, si elle est un naufrage nous préserve t-elle de l’acédie.    

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